à Michel Legrand

 
 
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Le bien-nommé

Lui qui avait fait de la musique une actrice de cinéma, maîtresse langoureuse, amoureuse de Steve et de Faye, de Catherine et de Jacques, de Françoise et de Gene, d'Agnes et de Jean-Luc, mais aussi de Miles, Quincy, Ray ou Sarah.

Lui qui, en dissident, s'était vu renié par sa professeur Nadia Boulanger pour s’être détourné de la musique classique et avoir cédé à la tentation du Jazz, cette musique avec “trop de notes” (Joseph II, à propos de Mozart), mal orchestrée, trop émancipée, trop colorée pour son époque.

Lui, qui avait fait sa devise de cette phrase de Cocteau: « Le tact dans l’audace, c’est de savoir jusqu’où on peut aller trop loin », il avait fait le choix de ne pas choisir, de soigner sa maladie de la mélodie avec passion et mélancolie, exercice coupable du funambule toujours sourd, à raison, aux accusations du “trop”.

 
 
 
 


A sa disparition, s’il plut sur nous comme sur les parapluies, ce fut La chanson de Delphine, célèbre sérénade du XXème siècle, ode au deuil amoureux, qui nous revint.

Mathieu Cesar et Ault. travaillent alors à la mise en scène d’un minuscule présent que notre génération porterait à son swing désormais d’outre-tombe. Parmi ses amis, Mathieu pense immédiatement à une interprétation de Clara Luciani.

Reste à trouver celui qui, avec elle, se risquerait à cette revisitation anachronique. Vladimir Cauchemar. Lui oserait, il ose tout et puis comme disait Michel, Quand je n'ai pas le temps de chercher, je trouve.

La musique de Vladimir nous parvient d’abord et c’est comme une machine à remonter le temps, orchestrale et spectrale à la fois. Puis, la voix de Clara se pose et tout devient évident, naturel, nécessaire, et des images de scopitone funéraire s’imposent à nous.

Avec cette nouvelle interprétation, Ault. témoigne de l’intemporalité du génie romanesque de Michel Legrand qui, nous l’espérons, swingue dedans sa tombe et par delà YouTube, se moque des bombes et se moque des vers...

Merci Michel.

 

Sabri Bendjabar